Éloge funèbre du Dr. Nyll Firmin CALIXTE

Pourquoi parler pour le Dr. Nyll Firmin Calixte ? Pourquoi prononcer un discours ? Pourquoi écrire et lire l’éloge funèbre de Me Nyll, comme ses concitadins, ses amis, ses étudiants, ses confrères et consœurs avocats et avocates l’appelaient avec respect et affection ? Comment même avoir la prétention de raconter la vie et l’œuvre d’un tel homme ?

Ce ne sont pas les mots, les expressions qui manquent pour ce faire. Dès l’annonce de son départ, les hommages ont fusé de partout. J’ai personnellement salué la mémoire d’un Avocat digne, un grand universitaire, un homme d’État remarquable, un porteur de lumières. A Fort-Liberté, dans tout le Nord-Est, au plus haut niveau de l’État, aux quatre coins du monde partout où se rencontrent les Fordauphinois et les Nordésiens, son nom revient dans les conversations. On pleure une grande figure, un intellectuel, un homme d’État, l’un de ceux qui ont marqué positivement l’histoire de ce pays.

On aurait rempli plein de pages si on devait parler de cet homme, de son parcours académique, de sa carrière politique, de ses œuvres dont la plus importante est sans nul doute l’École de Droit et des Sciences Économiques de Fort-Liberté qu’il a fondée en 1986. Rien qu’à lire l’hommage du Conseiller de l’Ordre, Me Jacquelin Rubes qui a rendu compte des différents postes prestigieux qu’il a occupés dans la diplomatie haïtienne, notamment comme Ambassadeur d’Haïti à Paris, à Bruxelles, au Luxembourg, auprès de l’UNESCO, du GATT, son rôle important dans la vie politique du pays, sénateur de la République, constituant, préfet, sa vie passionnante de professeur et de fondateur d’Université, les journaux qu’il a dirigés, les ouvrages qu’il a publiés, on se sent intimidé devant une vie si prodigieuse.

Non ! Point besoin de discours ! Point besoin de ces envolées oratoires qui auraient fait trembler la voûte de la Cathédrale de Fort-Liberté1 Point besoin de poésies écrites avec les larmes du chagrin et du désespoir ! Point besoin de manifester avec force sa reconnaissance ! Point besoin de signifier son respect ! Contentons-nous de nous incliner devant la dépouille de l’un des derniers géants que la terre haïtienne a produits. Les œuvres du Dr. Nyll Calixte parlent pour lui. Sa vie parle pour lui.

La ville de Fort-Liberté, dans son émoi, est secouée jusque dans ses pierres fondatrices. L’un de ses plus illustres représentants, son défenseur le plus farouche, vient de partir. Cependant, il restera éternellement dans le cœur des gens. Aucun discours ne peut rendre cette passion, cet amour, cet engagement, cette générosité. Le majestueux édifice de l’École de Droit gardera l’âme de son fondateur. En y entrant, en passant même devant son parvis, on saura toujours qu’un esprit éclairé l’avait conçu pour préparer les générations futures. Aucune expression, aucune citation latine ne pourra suffire pour remercier ce professeur, ce Docteur, qui a consacré sa vie à la formation de plusieurs milliers de jeunes qui servent aujourd’hui le pays dans des domaines divers.

Au Barreau de Fort-Liberté, nous cherchons encore les mots pour dire au Dr. Calixte qu’il a accompli un ouvrage extraordinaire, qu’il a fait de ce Barreau, son Barreau qu’il a intégré en 1960, un lieu où l’on retrouve de beaux esprits, des avocats compétents et intègres, des chercheurs renommés, de grands juristes qui sont la fierté de ce département. Nous cherchons encore les mots pour lui exprimer notre fierté d’avoir fait de nous ce que nous sommes aujourd’hui. Le bâton de St Yves que j’ai à la main, c’est ce professeur inspirant, ce doyen éclairé, directeur de mon mémoire de licence, qui m’a préparé à le tenir pour le bien de la corporation.

Non ! Point de mots ! Points de discours dithyrambiques ! Point de célébrations pompeuses ! Point de cérémonies avec un faste et un protocole digne d’un chef d’État. Me Nyll est plus que cela. Me Nyll était la ville de Fort-Liberté. Me Nyll était le Nord-Est. Me Nyll était l’incarnation d’un idéal plus beau, plus précieux. Il laisse son nom et ses œuvres à la postérité.

Le Dr. Nyll Firmin Calixte est entré debout dans l’histoire. Aucun propos n’exprimera jamais ce qu’il a été de son vivant. Il laisse un héritage qui est le précieux témoin de son passage sur cette terre. Cicéron a dit dans les Philippiques : " Brevis a natura vita nobis data est ; at memoria bene redditae vitae sempiterna." (La vie qui nous a été donnée par la nature est brève. Mais, la mémoire d’une vie bien remplie est éternelle.). La vie du Dr. Nyll Firmin Calixte ne fut pas courte. Elle fut longue. Elle fut surtout bien remplie de bienfaits, d’œuvres, de passion, d’engagement et de générosité. Sa mémoire est éternelle. Dans mille ans, on se souviendra encore de lui.

Il appartient désormais à l’histoire.

Fort-Liberté, le 21 janvier 2025.

Dr. Maismy-Mary FLEURANT

Bâtonnier de Fort-Liberté